Marie-Améthiste ► Athy pour les intimes

«Encore une fois, Marie-Améthyste Lucinda vient de nous prouver qu'elle mérite son poste. En effet, deux ans auparavant, tout semblait être contre cette jeune italienne. Sa mère, décédée dans un tragique accident de la route, venait de laisser derrière elle l'empire ULTRA. Le magasine de mode le plus en vogue du pays. La seule héritière? Marie-Améthyste, qui était en ce temps-là, rappelons le, fiancée à un architecte français du nom de Martin Gaune. Plus connue pour ses frasques que pour sa profession de mannequin, tous redoutait de voir entre ses mains la direction du magasine incontournable en Italie. Mais contre toute attente, elle releva le défi haut la main. Allant même jusqu'à exporter ULTRA en France, puis dans les différents pays Européen. Une première dans l'histoire de ce magasine qui connait une continuelle croissance. Nous pouvons même dire qu'elle a ...»

Blablabla... Depuis hier, toutes les critiques semblent se répéter. J'en viens même à vouloir une critique négative afin d'entendre autre chose. Si au moins, ils se contentaient de dire « Agréable surprise», sans pour autant en tartiner sur ma vie passée, je ne serais pas autant écoeurée d'allumer mon écran télévisé. Mais non, il faut continuellement faire un rappel sur la mort de ma mère, le fiasco que fut mon mariage avec Martin. Certains allant même jusqu'à prétendre que j'ai fait deux mois de cure. Alors que non, je m'étais simplement réfugiée en Australie, loin de tous et de tout. Qu'on se le dise, être mannequin ne veut pas pour autant dire « droguée». Et oui... j'ai fait bons nombres de bêtises, mais qui n'en a jamais fait ? À la différence de toutes ces personnes que l'on croise dans les rues, les miennes étaient grossies à la loupe et médiatisées.

- Athy? Lorenzo aimerez s'entretenir avec vous par téléphone. Selon lui, c'est urgent.

Lily-Rose, qui vient à l'instant de pénétrer dans mon bureau, affiche un petit air désolé. Elle sait très bien qu'à cette heure tardive de la nuit, je ne prends plus aucun appel. Néanmoins, lorsque Lorenzo dit que c'est urgent... c'est que ça l'est forcément. Je lui indique donc dans un simple hochement de tête qu'elle peut disposer. Sans broncher, elle s'éclipse aussi rapidement et silencieusement qu'elle est apparue. Nous collaborons depuis deux ans ensemble. Elle a toujours été là pour m'épauler et m'accompagne depuis mes débuts. Elle est ma tête, mes épaules et en quelque sorte, la mère que j'ai perdue. Non, L. Rose n'est pas vieille, elle est en fait plus jeune que moi. Mais elle a ce côté mère poule et bienveillant qui fait d'elle ma meilleure amie, ma confidente. Ce n'est pas qu'une simple assistante. Néanmoins, le boulot reste le boulot. Et elle doit m'obéir. Une fois de nouveau seule, je décroche alors le combiné.

- Mon amour, désolée de te déranger, je me doute que tu as énormément de travail en ce moment, avec la préparation de ton nouveau numéro, mais il fallait que je t'appelle de toute urgence.

Le ton qu'il emploie ne me rassure guère. Il semble craindre quelque chose. Probablement ma réaction. Car il est vrai que je peux me montrer très colérique et haineuse. Pourtant, on ne le dirait pas. Je peux me montrer si douce, si attentionnée, qu'on en oublie le volcan qui sommeil en moi. Seulement, une fois qu'il éclate, il est très mauvais d'être à proximité. Dans l'attente d'une suite, je croise les jambes, mon expression faciale exprimant toute la perplexité dont je fais preuve.

- J'ai sous les yeux un contrat des plus importants et j'ai besoin de ton avis.

Je ne répond rien, méfiante. Un long silence s'installe où seul les bruits de nos respiration trahissent la présence de chacun. Se raclant la gorge, il finit alors par reprendre.

- En acceptant, je devrais quitter l'Italie et m'installer en Irlande.... et j'aimerais que tu vienne vivre avec moi.

Avec Lorenzo, nous avons trouvé un arrangement. Je devais le rejoindre une fois le nouveau numéro d'ULTRA sorti. C'était une excuse comme une autre pour me donner du temps. Pour me faire à l'idée de quitter l'Italie, ce pays que j'aime tant. Je voyage souvent, mais jamais je n'ai quitté de façon définitive cette botte. Et d'ailleurs, je ne suis toujours pas prête à abandonner mon passé de façon aussi drastique. Alors oui, je suis actuellement en Irlande depuis quelques heures, mais non, ce n'est pas pour rejoindre Lorenzo. Ces quelques semaines, j'ai longuement réfléchis. Avec Lily-Rose nous avons beaucoup discuté et je me suis rendue compte de plusieurs choses. Premièrement, je ne suis pas amoureuse de Lorenzo. Entre nous, c'est essentiellement physique, attractif. Je ne peux pas baser mon mariage sur une simple attraction. Je vais donc l'appeler sous peu, puis lui dire que finalement, le mariage n'aura pas lieu. Seconde chose, l'Irlande est une destination intéressante pour un projet futur, concernant mon magasine. C'est pourquoi je me suis établie ici, dans un prestigieux hôtel. Cet endroit regorge de paysage époustouflants. J'imagine déjà certains photo-shoot... Et troisièmement, en Irlande, rare sont les personnes qui ont entendu parlé de moi. Tout du moins, je l'espère. Je vais donc pouvoir me promener dans les rues avec une certaine tranquillité d'esprit. Quoi que... je suis là pour travailler, et non plus flâner.

L'un dans l'autre, pour plus de sécurité, j'ai pris avec moi Vendlow. En plus d'être un genre de garde du corps, il était anciennement un ami à mon père. Ces deux là étaient proche. Suffisamment proche pour qu'à ce jour, il me considère comme sa propre fille. Depuis la mort de maman, il a pris une place importante dans ma vie. Ce qui n'a pas toujours été le cas. A vrai dire, avant, je ne le connaissais pas. Il a passé pratiquement tout ce temps à me surveiller de loin, dans l'ombre. Ma mère lui avait donné l'interdiction de m'approcher. Elle refusait de me voir mêlée d'une quelconque manière aux fréquentations douteuses de mon père. Je pense qu'elle ne sait jamais pardonnée d'avoir conçu un enfant avec un mercenaire. Dans sa grande naïveté, elle avait tenté de fuir mon père. Seulement voilà, on ne fuit pas un tueur à gage. Il eut vite fait de la retrouver et de lui imposer certaines conditions. De ce fait, je prenais régulièrement un vol, en direction de Londres. Enfin... jusqu'à l'âge de mes huit ans. Après cela, il a été tué, assassiné. En tout cas, c'est ce qu'affirme Vendlow, avec haine. Une fois, je l'ai même entendu marmonner " Les éradiqueurs se soulèveront et les asserviront." Je n'avais rien compris, et encore à ce jour, je ne comprend pas. Probablement un petit délire avec lui-même et la vodka.

Toc! Toc! Toc!

Trois coups, ferment et autoritaire, s'abattent sur la porte d'entrée. Quand on parle du loup, en voilà la queue. Cela ne peut être que Vendlow. J'arrête donc de ranger mes affaires et m'élance jusqu'à l'entrée. Sous mon peignoir ouvert, ne se trouve rien d'autres que ma petite dentelle. Et en temps normal, je me serais chargée de cacher tout ça. Or, il s'agit que de Vendlow, aucun risque à avoir. Je lui ouvre donc la porte et le laisse entrer. Comme souvent, il affiche une mine dure et sévère. Ce qui contraste totalement avec mon visage doux, aux airs de poupées fragiles. Je ne m'en inquiète pas, une telle humeur n'est pas signe de mauvaise nouvelle, mais d'une nuit sans femme.

A grandes enjambés, il va s'affaler sur le canapé et pose ses pieds sur la petite table basse. Finalement, il vient peut-être de remplir un contrat. Ce qui explique à quel point il semble éreinté. Dans ma grande gentillesse, je m'approche donc de lui et pose mes mains sur ses épaules. Aussitôt il se raidit et se relève promptement, s'éloignant.

- Athy, non! dit-il avec autorité, avant de se radoucir. Retourne dans ta chambre et continue de ranger tes affaires.

Bien que je ne comprend pas un tel comportement de sa part, je m’exécute. Aurais-je attrapé la peste? Quoi qu'il en soit, je peux vous assurer que ça me reste au travers de la gorge. Une chance pour lui qu'une longue journée m'attends demain et que je dois à tout prix me reposer. Sinon, je lui en aurais fait voir de toute les couleurs... Ah... demain... demain promis, j'annonce à Lorenzo que je le quitte.